12 août 2010

Nouvelle crise à France Soir: Pougatchev, qui veut du trash, menace de virer le patron de la rédaction.

Par Renaud Revel

Les crises se suivent, mais ne ressemblent pas à France Soir, où les méthodes exotiques de son nouveau propriétaire, depuis janvier 2009, le jeune oligarque russe Sergueï Pougatchev, (photo) sont en train d'ébranler à nouveau le difficile équilibre de ce titre. C'est à grands roulements de tambour et à l'appui d'une campagne de pub imposante, d'un montant de 20 millions d'euros, qu'il avait pourtant lancé, le 17 mars dernier, une nouvelle formule, avec l'objectif stupéfiant de faire passer les ventes de France-Soir, encalminées aux alentours de 23.000 exemplaires depuis des lustres, à 200.000 exemplaires! Illusoire

Pour cela, il avait procédé à un grand ménage au sein d'une rédaction renouvelée de fond en comble et dont la direction était confiée, alors, à l'ancien patron du Journal du Dimanche, Christian de Villeneuve. Installé dans des bureaux flambant neufs, donnant sur les Champs-Élysées, le nouveau France-Soir se promettait d'aller tailler quelques croupières à l'indéboulonnable Parisien-Aujourd'hui en France: une opération commando de longue haleine.
Pas à pas pourtant et avec des moyens humains limités, la nouvelle direction parvient dans un premier temps, non seulement à endiguer la chute des ventes, mais également à doucement remonter la pente, pour atteindre au début de l'été le seuil, inespéré en si peu de temps, des 85 000 exemplaires. Mieux, au cours de cet été, France-Soir est parvenu à engranger de nouveaux lecteurs, si bien qu'à ce rythme, Christian de Villeneuve pouvait espérer tengeanter la barre des 100 000 exemplaires à a fin de l'année: un miracle.
C'était sans compter sur le très impétueux et très rustique propriétaire de ce quotidien...Mécontent de résultats, qu'il semble juger encore trop insuffisants, dans un marché où gagner un point de part de marché relève de l'exploit, Pougatchev s’impatiente. Il vient de hausser le ton, menaçant de tout remettre une nouvelle fois à plat et de changer à la fois de formule et de patron. C'est son objectif.


Un brin fébrile et à l'évidence, selon des sources internes, totalement déconnecté des réalités économiques de la presse française, _ dont il découvre peu à peu les ressorts et les mécanismes _, disposant d'une culture politique qualifiée de «d'extrêmement sommaire» au sein du journal et d'une vision de la presse plutôt caricaturale, Sergueï Pougatchev a convoqué pour demain jeudi, lettre recommandée à l'appui, Christian de Villeneuve, en vu d'un entretien préalable! Mauvais présage...
Journaliste émérite, ce dernier, qui a remis sur les rails un quotidien voué à la disparition il y a encore six mois, pourrait ainsi se voir signifier tout simplement son limogeage dans les jours qui viennent, le tout sur fond de crise ouverte. Ou se voir sommer d’opérer un virage éditoriale à 90°. L’intéressé l’acceptera t-il ?

Mais que veux Pougatchev? A l'évidence, opérer à l’évidence un virage à angle droit, afin de chasser de nouveaux lecteurs, s'il en est, plus populaires. C'est ainsi qu'il s'est entouré des conseils de deux anciens cadres allemands du groupe de presse d'outre-Rhin, Bild, l'empereur de la presse « ultra-popu»: Peter Klave et Olger Wiemann. «Si pour faire de l'argent, je dois faire un journal trash, je ferai un journal trash», confiait ces jours-ci Pougatchev dans les couloirs de France-Soir, alors que les Allemands le poussent à faire de son journal un quotidien bas de gamme inspiré de ce qui se fait de pire en Allemagne, avec Bild ou en Grande-Bretagne, avec le Sun.
Et avec qui à sa tête, si d'aventure Christian de Villeneuve était amené à abandonner les rênes? Le nom de l'ancien patron du Figaro Magazine et du journal l'Equipe, Rémy Dessarts, circule…

Inutile de dire que l'inquiétude est grande au sein du journal, où Sergueï Pougatchev inquiète sérieusement. Non seulement pour son empressement à vouloir défaire ce qu'il avait mis sur pied à grands renforts d'argent _ celui de son industriel de père_, il y a maintenant cinq mois. Mais également, pour ses prises de position ultra droitières qu’un Le Pen ne démentirait pas. C'est une rédaction estomaquée qui l'a vu proposer récemment une série de couvertures sur l’immigration pas piquées des hannetons. L’une de ses manchettes préférées se passe de commentaires: «Les Arabes sont tous des violeurs !». Estomaquant, en effet! Avec ça, «coco», tu repasses à 19 000! Et engrange au FN.


Source: http://blogs.lexpress.fr/media/2010/08/nouvelle-crise-a-france-soir-p.php


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire