24 mai 2011

«Quand ma voie a été éclairée par l'Islam, je suis revenu à la chanson»


Pour la première fois en concert au Maroc (à Mawazine), Yusuf Islam, ou Cat Stevens, dévoile sa voie spirituelle et ses convictions dans la vie. Un homme chaleureux, charismatique et très serein.

LE MATIN : La tuberculose dont vous avez
été atteint en 1969 a-t-elle été pour quelque chose dans votre choix spirituel ?
ISLAM YUSUF :
Peut-être que le début de ma recherche de la foi était lié à cela. Car quand j'avais attrapé la tuberculose, j'ai senti, à certains moments, que j'allais mourir. Je regardais le ciel noir et je me demandais qu'est-ce qu'il y avait derrière. C'était le départ de quelque chose.

Votre génération de musiciens voulait changer le monde grâce à la musique, en exprimant les craintes et les espoirs des jeunes ? Avez-vous le sentiment d'y être parvenu ?
Même si rien ne s'est passé, ces rêves et ces visions des artistes allaient préparer d'autres lendemains qui ont pris du temps pour voir le jour. On peut, toutefois, noter un impact de ces soulèvements artistiques sur les politiciens. Car nous n'avons jamais cessé d'appeler à la paix et à l'égalité des droits.

Vous avez quitté la chanson pendant un bon bout de temps, puis vous êtes revenu sur la scène ? Quelles en étaient les raisons ?
Quand j'ai quitté la scène, j'avais des raisons. J'avais besoin d'avoir des réponses à des questions pertinentes sur la vie. Ces réponses, je les ai trouvées dans le Coran. C'était donc cet aspect spirituel qui me manquait. Quand ma voie a été éclairée, je suis revenu à la chanson et j'ai démarré une nouvelle vie de famille où je me suis plus consacré à l'humanitaire et à la paix.

Comment vous sentez-vous quand vous accomplissez un travail humanitaire ?
Je me sens béni par Dieu, car j'ai consacré ma vie au travail de la charité et de la paix. Je veux utiliser ma connaissance spirituelle dans tout ce que j'entreprends. C'est un voyage où je me retrouve. Étant donné que je suis d'un père grec et d'une mère suédoise, je suis arrivé à créer mon propre pays.

Votre choix religieux vous a-t-il créé des problèmes ?
Il y a cette tendance de l'être humain à avoir des préjugés. Quand j'ai adopté l'Islam, d'autres ont vu cela comme une fracture. Ils n'ont rien compris.
Les politiciens m'ont associé au fondamentalisme. D'où ma chanson : «Ne m'interprétez pas mal».

Est-ce que cela ne vous choque pas de voir comment est perçu l'Islam dans le monde ?
Je constate que la majorité musulmane est silencieuse. L'Islam a besoin d'un porte-parole. Il faut faire revivre l'esprit de l'Islam qui veut dire Assalam (la paix). Il faut construire de vrais ponts entres les peuples.

Que pensez-vous du «printemps arabe» ?
Quand j'ai vu ce qui se passait en Égypte et en Tunisie, cela m'a rappelé les années 60 chez nous.
C'est ce qui m'a inspiré la chanson «My people» qui est un appel à la liberté pour le bien de l'humanité. Dieu nous a donné des conditions de base pour vivre notre vie comme nous voulons, sans toucher à la liberté des autres. L'être humain veut priver son prochain de cette liberté.

Votre choix spirituel pour l'Islam ne vous a-t-il pas empêché de rester fidèle à votre ancien répertoire ?
J'aime beaucoup mes anciennes chansons qui représentent pour moi des messages et pour les autres aussi. Par contre, j'ai laissé tomber certaines chansons parce que je suis plus intéressé par la paix et l'humanisme.

Que connaissiez-vous du Maroc avant de
venir chanter à Mawazine ?

Je connais la ville d'Essaouira. Elle m'a été présentée par un traducteur anglais qui était lui aussi musulman.
Je garde un bon souvenir des gens que j'ai connus dans cette ville.
Quant à Marrakech, je l'avais visitée bien avant, dans les années 70. Je la trouve très mystérieuse. Je peux aussi ajouter que j'ai écrit deux chansons au Maroc: «If I Love» et «How Can Tell You».

Une légende vivante

Né en 1948 à Londres, d'un père chypriote grec et d'une mère suédoise, Yusuf Islam (Cat Stevens), de son vrai nom Steven Demetre Georgiou, se passionne de la musique depuis son jeune âge. 1967 représente pour lui l'année des premières tournées où il se produira avec le Jimi Hendrix Experience et les Californiens de Walker Brothers.
En 1969, la tuberculose met sa vie en danger et ouvre une parenthèse d'interrogations sur sa vie passée. Quand il reprend sa carrière en 1970, il adopte un nouveau tournant musical, plus intense, faisant de lui une star mondiale offrant des morceaux forts en émotion. C'était le début d'une autre phase qui le mène vers la conversion à l'Islam en 1977.
Ce génie intemporel, qui a écoulé plus de 100 millions d'albums dans le monde, consacre, depuis, son temps et ses revenus à des œuvres de bienfaisance.
Aujourd'hui Yusuf Islam est réconcilié avec son passé, ses chansons sont intemporelles et de renommée mondiale. Il est toujours présent dans le cœur des fans comme l'un des plus grands artistes de tous les temps.

Source : www.lematin.ma

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