Les
musulmans dans la plupart des pays du monde ont connu une fin de Ramadan particulièrement mouvementée
et confuse. En effet, les décisions concernant la date de l’Aïd ont été
surprenantes à plus d’un titre. Comme je vais l’expliquer dans cette analyse, l’erreur
incombe aussi bien à une majorité de fouqahas qu’ à une minorité d’astronomes.
Revenons
d’abord aux faits. Dans la moitié nord du monde musulman, la lune s’est couchée
(le lundi 29 août) avant le soleil. Il en a été de même dans toute l’Europe,
le gros de l’Asie, et du Canada. Dans la partie sud du monde musulman, le reste
de l’Asie et l’Australie, ainsi que la partie de l’Afrique au nord de l’équateur
et les Etats-Unis, la lune s’est couchée après le soleil, mais avec un délai trop
court (moins de 20 minutes) pour permettre une observation, aussi bien à l’œil
nu qu’au télescope. C’est seulement dans la partie sud de l’Afrique que le
croissant pouvait être vu, et uniquement au télescope. Quant en Amérique du Sud
le croissant pouvait être observé soit à l’œil nu, soit au télescope.
Donc,
pour résumer, les fouqahas avaient trois choix possibles (logiquement) :
1)
se baser sur la présence du croissant dans le ciel dans n’importe quelle
région du monde
– mais sans possibilité d’observation – le lundi 29 août, et décréter
l’Aid pour le
mardi 30 août. Dans ce cas, il s’agit de l’adoption d’un critère de
calendrier purement astronomique (ce que font la Turquie et la Malaisie,
par exemple) ;
2)
insister sur une observation locale et accepter que le croissant ne pouvait être
vu le lundi 29, donc l’Aïd ne pouvait être fixé que le Mercredi 31 août. C’est ce
qu’a conclu Le Sultanat Oman, qui a annoncé une semaine auparavant qu’il n’y aurait
aucune campagne d’observations le 29, que le Ramadan durerait 30 jours et que
l’Aïd serait célébré donc le 31 ;
3)
accepter la possibilité d’une observation au télescope au sud de
l’Afrique ou à l’œil nu au sud du continent américain le lundi 29, et décréter
l’Aïd pour le Mardi 30. Encore que cette seconde option supposait qu’on
n’attende pas la confirmation d’une observation (compte tenu du décalage
horaire), et qu’on ne se base que sur la possibilité d’une
observation. C’est cette dernière solution qui a été retenue par le Conseil Européen de
Fatwa et de Recherche, même s’il n’a pas explicitement reconnu ce dernier point
concernant la possibilité éventuelle (uniquement) d’observation.
Seulement
voilà, pour nous musulmans, les choses se déroulent rarement selon des choix
logiques et cohérents. D’abord, il y a eu un petit nombre de personnes se présentant
comme « astronomes » qui ont commencé par « bruiter le
signal » en déclarant à la presse ici et là que le croissant pouvait
être vu le lundi 29, y compris dans certaines régions du monde musulman.
(Les vrais experts sont connus et peuvent être consultés sur cette question,
mais malheureusement la presse (où Oumma fait figure de grande exception) éprouve quelques difficultés à y voir clair.)
Nous avons reçu ensuite des communications privées nous
informant que la Cour Suprême d’Arabie Saoudite (qui décide de l’acceptation ou
non des témoignages d’observation soumis par les uns et les autres, et qui est composée
de 9 fouqahas de haut niveau) allait accepter toute « observation »
du croissant qui se ferait en un lieu où la lune se coucherait après le soleil,
même avec un délai d’1 minute. (Pour rappel, le record mondial d’observation à
l’œil nu est de 29 minutes, et celui effectué à l’aide d’instruments optiques
de 20 minutes).
Bien
sûr, quand on fait fi de la science – et bien que toutes les données aient été communiquées
à la Cour Suprême saoudienne et à toutes les instances officielles du monde
musulman par voie directe ou par le biais de de presse – on ne peut produire que des
décisions désastreuses.
J’étais
en direct sur le plateau d’Al-Jazeera lorsque les premiers échos sont arrivés selon lesquels
3 saoudiens avaient « vu » le croissant dans une région au nord
de Riyad où la lune s’est couchée 30 secondes ( !) après le soleil. Pendant que la
Cour Suprême délibérait, nous autres astronomes avons tout de suite averti tout le
monde des implications socio-religio-scientifiques de l’acceptation d’un tel témoignage.
Le vice-président de l’association astronomique de Djeddah, s’exprimant en
direct de Taif, a affirmé que si un tel témoignage venait à être validé, « il
faudrait tout simplement fermer les universités et les observatoires en Arabie
Saoudite » (puisque leur science était tout simplement rejetée).
Le
témoignage a bel et bien été accepté, et l’Aïd a été décrété le mardi 30 août. Une
douzaine de pays se sont ensuite immédiatement alignés sur cette date.
En
Libye, où jusqu’à cette année on suivait le principe du calendrier (un peu
bizarre mais du moins ordonné), on a d’abord appelé les fidèles à observer le
croissant le 29, mais en milieu de soirée un communiqué a été envoyé, déclarant
qu’aucun témoignage n’a été avancé… et que cela était conforme aux données
astronomiques… puisque le croissant ne pouvait être vu ! L’ Aïd a donc été fixé au 31août.
En
Algérie, le pire a été atteint. Le comité chargé de la décision des dates des
célébrations religieuses a effectué une annonce en milieu de soirée dans laquelle il mentionne que le
croissant « a été vu » dans 2 wilayas (départements) où la lune s’était
couchée avant le soleil ( !) et deux autres où le délai était de 6 ou 7
minutes ! Là aussi, l’Etat devrait fermer les universités et les
observatoires, puisqu’il ne reconnait pas leur science…
En
France enfin, le Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) a annoncé l’Aïd pour
le mardi 30 août par un communiqué lapidaire qui n’expliquait en rien le principe adopté.
Principe qui aurait pu être logique et acceptable (les options 1 et 3
ci-dessus), surtout s’il avait été expliqué à l’avance ; laissant ainsi de
nombreux musulmans dans la confusion.
Mais je note avec la plus grande satisfaction que le CFCM
vient d’annoncer que « Les dates du Ramadan et de l’Aïd El Fitr seraient
désormais fixées à l’avance » (voir l’article d’Oumma le 1er
Septembre), en mettant en place un calendrier islamique produit par un groupe
d’experts. Une solution que je n’ai cessée de préconiser (voir mes
articles sur Oumma il y a prés de 4 ans : Partie 1 et Partie 2).
C’est aussi la
solution adoptée par l’Islamic Society of North America depuis plus de 5 ans
maintenant, sur la base d’un remarquable travail de jurisprudence islamique
(Fiqh) de la part de son Conseil du Fiqh. Je voudrais signaler à l’occasion le
livre important du Dr. Zulfiqar Ali Shah, qui préside ce Conseil du Fiqh de
l’ISNA, sur le sujet : The
Astronomical Calculations and Ramadan : A Fiqhi Discourse (2009).
Sans oublier,
la Turquie qui depuis des années a adopté le principe du calendrier. Ce
pays n’est confronté à aucune confusion ou chaos à la veille de
toute célébration religieuse islamique.
Les Turcs régissent leurs vies (religieuses et temporelles, qui ne
peuvent qu’être
intimement liées) d’une manière moderne.
Source : www.oumma.com
Le mufti d'Egypte a déclaré que c'est Israel qui est derrière ceux qui disent que la lune n'a pas été vue lundi , alors que le mufti d'arabie Saoudite déclare que celui qui dit ça se moque de la sunna du Prophète , toujours les mêmes arguments pour défendre les conneries : le takfir ou la théorie de complot
RépondreSupprimer